vendredi 22 septembre 2006

Des mots, des mots, encore des mots... et puis des phrases.


Mouais. J'aime bien écrire. Je n'ai aucune idée d'où ça peut venir, et en réalité le seul fait que cela me plaise me satisfait. Je ne prétend pas avoir du talent, j'aime juste mettre mes pensées sur papier, mes idées, mes rêves. Alors ne soyez pas étonnés si, dans le coin, vous tombez parfois sur un écrit... une nouvelle, un essai, n'importe quoi. D'ailleurs, ceci aussi est un écrit. Damn. Fuck it. Bon, il y a un texte que j'ai écrit il y a quelques mois qui colle bien à l'ambiance de ce blog, du moins pour l'instant. Le voici :


La Lande

Fait étrange que j'ai découvert aujourd'hui : les Hommes recherchent tous la considération, l'amour d'autrui ; cela pourrait paraître évident à bon nombre de gens, et peut-être même à tous, mais il est de mon devoir de préciser qu'il y a un temps où cela n'était pas.


Il y avait un temps où les Hommes vivaient solitaires, n'obéissant qu'à leurs choix personnels, leurs goûts et leurs opinions. On aurait pu se demander comment ils survivaient, seuls, dans un univers impitoyable comme celui que nous connaissons. La réalité est qu'il y avait pas d'univers impitoyable ; juste une surface mauve, infinie, plate, morne sans défauts - même microscopiques - et un ciel de la même couleur, remué par quelques effluves noires nées d'on ne savait où. Les Hommes ne se connaissaient pas, et ne se voyaient pas. Les Hommes pensaient être le dernier sur ce qu'ils appelaient la Lande. Ils parcouraient le monde en quête de réponses, sans avoir de questions, et vivaient au jour le jour, prévoyant juste leurs autres interrogations futures. Il se nourrissaient de plantes qui poussaient à différents endroits de la Lande ; totalement diaphanes - diaphanes car éclairées par un soleil rond et jaunâtre caché au loin au-dessus de cette atmosphère oppressante -, totalement diaphanes donc, et dont l'extrêmité, appelée le Globe en raison de sa forme, contenait les apports énergetiques nécessaires à l'Homme - c'est-à-dire 2500 kilocalories, ni plus, ni moins. On aurait pu se demander comment tous les Hommes "savaient" que cette fleur s'appelait le Globe et que leur terre répondait au nom de la Lande... en vérité, nul ne le savait, mais tout le monde le disait.
Les conditions de naissance des Promis (c'était le nom qu'ils se donnaient) étaient assez banales, mais également mystérieuses. Il se réveillait, d'un sommeil infini, les yeux protégés par des lunettes de couleur mauve, aux branches recouvrant totalement les oreilles, adoptant exactement leur forme, embrassant les canyons, les vallons, les failles, le lobe, et l'infinie chute vers le tympan. Ils se réveillaient donc dans un silence de plomb et une vue nulle - si ce n'est une couleur mauve -, dans un environnement totalement clos. Puis, ils se levaient doucement, sentant leurs membres, se découvrant de nouvelles applications, bougant la tête à gauche, à droite, vers le ciel, puis faisant deux pas en avant, trois en arrière, sautillant, comptant leurs doigts. Enfin, ils sentaient que ce qui se trouvait sur leur visage n'était pas naturel, et tentaient désespérement de faire disparaître cet écran violet, en secouant la tête, ou en frappant sur les verres à coup de paume ou de bras. Au fil du temps, ils commençaient à comprendre à quoi servait les doigts ; et au final, les plus doués se débarrassaient de leur paire de lunettes en moins de 5 heures, paire de lunette qui disparaissait au moment où elle touchait la Lande, absorbée par cette dernière. Le plus étrange dans cette naissance était sans nul doute le fait que les Promis avait déjà quelque notion du langage, même s'il ne ressemblait en rien au notre, et parvenaient à réfléchir en fonction du monde qui les entourait. Ils avaient, excepté la connaissance de leur corps, à peu près la même vision des faits qu'un adulte d'une trentaine d'années, à l'exception faite qu'ils étaient dans un endroit dont ils ne savaient que le nom - la Lande - et que leur conception de toutes les données pré-citées étaient largement différente de la notre. L'âge également, puisque cette notion n'était pas intégré dans leur façon de raisonner.



Cet ordre parfait se perpétuait indubitablement, durant depuis des âges immémoriaux. Pourquoi tous ces gens ne se rencontraient-ils jamais ? Nul ne le savait, probablement parce qu'ils ne laissaient jamais de traces derrière eux, la Lande absorbant tout ce qui était nécessaire, contenant en elle mille et un secret. Jusqu'au jour où un Promis - répondant au nom de Plexus 148 ; nom dont il ne connaissait pas l'origine, mais qui était sien - sorti du concept pré-établi, et eu soudainement l'envie d'écraser un Globe. Pourtant, il savait pertinemment qu'aller à l'encontre du courant n'était guère une bonne chose ; ainsi, au moment où son pied s'écrasa sur la fleur, sur ses pétales, et sa tige fragile, son pied pénétra au travers de la Lande, et il disparu tout entier. Il ne réapparut jamais à la surface, et à vrai dire cela n'inquiétait personne, car chacun vaquait à ses occupations - c'est-à-dire se questionner.
Cependant, cette disparition avait entraîné un changement soudain et intriguant. Le ciel, auparavant composé des couleurs mauves et noires, se transforma subitement en toile de rouge et de jaune ; le sol de la Lande sembla se courber, et le mauve devint violet, certains trous se créérent, et des collines naquirent. Les Globes devinrent plus grands, opaques, et leur couleur se rapprocha doucement d'un vert pomme. Ce changement brutal sema le trouble dans tous les esprits : les Promis se questionnèrent plus encore, remettant en cause ces couleurs, se demandant d'où venaient toutes ces choses. Au fur et à mesure qu'ils marchaient, ils sentaient la fatigue venir, et les Globes ne parvenaient plus à combler leurs manques ; les vallées créées les inquiétaient, et ils préfèraient sans nul doute la plaine à cette totale démesure dans le concret.
Mais, peu à peu, ils oublièrent leurs suspicions, et quelque moments plus tard, la norme était au ciel jaune et rouge, à la Lande violette, et au globes de taille 6 - la taille 6 étant la 3ème des 10 tailles concues par l'esprit des Promis. Ils recommencèrent à se poser leurs habituelles questions, errant comme pour atteindre le bout de la Lande - le bout du monde, peut-être, s'il y avait eu la conception d'un monde -, combattant la fatigue comme ils le pouvaient.


Néanmoins, alors qu'il avalait un pétale de Globe, Bois AX se demanda comment avait eu lieu sa naissance. D'où venait-il ? Quelles étaient ses origines ? Il se mit alors en quête de répondre à cette question, et marcha, plusieurs Temps - unité des Promis - jusqu'à ce qu'il se pose une question qui n'avait pas de sens : qui était à son origine ? Alors que tous les Promis naissaient seuls, lui se demanda s'il n'y avait pas quelqu'un qui était la cause de sa Conséquence. Il s'assit sur la Lande, au sommet d'une colline, et contempla l'horizon, morne. Il voulait donner un nom à son idée ; mais, posant la main sur la Lande, son corps disparu tout entier au travers, et ne réapparut pas. Il y eut alors un grand tremblement, et l'ordre des choses fut à nouveau chamboulé ; dans la Lande, de grandes failles s'ouvrirent, engloutissant les globes ; les montagnes devinrent plus grandes et les creux plus profonds, le ciel, dans une explosion de paillettes, adopta la couleur uniforme du marron ; et les Globes devinrent phénoménaux, et se muèrent en une myriade de couleurs : la tige devint bleue, et les pétales rouges, et le fruit en lui-même vira au gris. Partout sur la Lande, les Promis se questionnaient par rapport à ces grandes failles, et s'asseyaient sur leurs bords, scrutant irrévocablement le fond, noir et sombre. Ils souhaitaient tous savoir ce qu'il y avait au fond. Ils souhaitaient tous savoir ce qu'ils ne connaissaient pas. Leurs questions habituelles ne les satisfaisaient plus, et ils voulaient connaître cet inconnu, l'apprivoiser. Non pas qu'ils en aient eu peur ; mais le désir de tout contrôler était ancré en eux comme un Globe à sa tige, et ils ne supportaient pas cette infinité qu'ils ne maîtrisaient pas. Tous, ils s'assirent sur le bord des crevasse, battant allégrement des jambes, la tête pendante, les yeux fixés vers le bas. Mais leur besoin quotidien de nourriture les forçait à se déplacer continuellement pour chercher de nouveaux Globes, les empêchant par la-même de comprendre ce phénomène. Ils se mirent alors à faire ce qu'ils appelèrent des Galaxies ; ils cueillirent plusieurs Globes à la fois, et les posèrent à côté d'eux, ce qui leur permettait d'en manger à leur guise ; le geste, jusqu'alors nécessité, devint peu à peu plaisir, comblant l'ennui de la monotonie. D'autres Promis, vite lassés, finirent par s'amuser à sauter au-dessus des plus petites des crevasses, ou à se suspendre au bord, à un ou deux bras, faisant le pont entre les deux rives. Leur morphologie, jusqu'alors assez simple, fine et droite, se développa subitement : certains virent leur ventre croître, d'autres leur bras, d'autres leurs jambes... et ce changement les inquiéta, car de toute leur vie ils n'avaient jamais vu pareille chose. Ils se mirent à caresser doucement ces excroissances intriguantes, les posant sur leurs oreilles quand ils le pouvaient, cherchant à capter un quelconque signe... signe de quoi ? Qu'importe, ils attendaient juste un signe, quelque chose qui leur permettrait d'apporter du renouveau à leur vie.

Au moment précis où cette idée naquit dans l'esprit de Morale 7, un éclair gigantesque zébra le ciel et vint frapper la Lande. Un trou béant se créa, plus profond que les failles infinies qui étaient nées jusqu'alors. Mais cela ne s'arrêta pas là : du cratère partirent maintes et maintes nouvelles failles, plus larges, sécantes, isolant ainsi certains blocs de Lande. Le sol devint peu à peu gris métallisé, et le ciel s'approcha du bleu marine. Mais le plus inquiétant, c'est que le sol devint friable, et que malgré tout, les Globes poussèrent plus nombreux et plus grands encore, tandis que de véritables montagnes voyaient le jour.
Les Promis furent intéressés par ces changements, puis déçus, puis ils crurent à une nouvelle ère. Ils pensaient exactement en même temps, réglés sur le même Temps. Certains se retrouvèrent dans l'incapacité de s'évader, prisonniers sur une parcelle de Lande de 3,67 Tailles carrées parfois, alors que d'autres virent leurs Galaxies disparaître au fond des abîmes. Le calme revint peu à peu, et les Promis s'habituèrent à ce nouveau cadre de vie.
Jusqu'au jour où l'un d'entre eux, A+ 5, trébuchant sur un Globe, s'étala de tout son long sur la Lande, et son visage heurta le sol - heureusement mou. Il s'enfonca légèrement, et, se relevant, il fixa sa trace en se demandant ce qu'il y avait au-dessous. Que renfermait cette Lande ? Il s'approcha d'une faille proche, baissa les yeux vers le fond, pris une profonde inspiration - probablement due à cette question - et sauta.

A cet instant précis, un autre Promis, Potassium, dans ses élucubrations, se rendit compte qu'il n'aimait pas son prénom, et que d'ailleurs il n'aimait pas non plus la couleur de ce monde, ses creux, ses montagnes, ses failles et ses Globes. Il voulait changer la Lande. Il décida d'apporter sa touche personnelle à cet univers, en fabriquant, à l'aide de la terre friable de la Lande, une forme qu'il appelerait Perfection, parce que chacun de ses côtés faisait la même taille. Il se mit à l'oeuvre Puis, le mouvement s'enchaîna rapidement : Symbiose décida de créer une nouvelle unité de compte, qu'il appelerait Farandole, parce que les Tailles ne lui permettaient pas de compter le nombre de Globes qui composaient ses Galaxies ; Prophane décida que son apparence laissait à désirer, et se demanda d'où venait ce changement ; Ere souhaita créer quelque chose qui paraisse magnifique à ses yeux ; elle ramassa plusieurs Globes et les disposa en cercle, et jugea que cela correspondait à la beauté.

Chaque Promis, quel qu'il soit, ne se conduisait plus comme avant, et chacun créait, inventait, nommait de nouvelles choses, pensait, agissait, vivait différemment. Alors, dans une explosion gigantesque, la Lande implosa, propulsant des débris en tout endroit. Le ciel se fissura subitement, et des flots mauves jaillirent de cette zébrure. Tout s'éteignit dans le blanc et la lumière, et peu à peu des dizaines, des centaines, des milliers, des millions, des milliards de chuchotements se firent entendre dans la toile blanche qui s'était fixée. C'était les voix de tous les Promis, qui énonçaient leur nom ; on entendait Plexus, Bois, Morale, A+5, Potassium, Symbiose, Prophane, Ere, et chacun murmurait doucement son nom, dans un calme et une compréhension parfaite malgré le bruit. Et le silence revint ; et le blanc devint noir.

Il y eut une fin.


Puis j'ouvris les yeux. Au- dessus de ma tête, j'aperçus vaguement un mur blanc, formé de plusieurs dalles. Un goût étrange dans la bouche. Je sentais qu'on me touchait. "On" ? Qui cela ? Cela me troubla, car je ne voyais rien, excepté ces dalles blanches. Je me mis à ressentir une sensation étrange montant en moi, et quelque chose coula le long de mes yeux. Je me mis à crier, et quelque chose sortit de ma bouche. Un long bruit, interrompu uniquement par mes respirations. Puis on déplaça mon chant de vision, et j'aperçus quelque chose. C'était grand, et de couleur étrange, et au but inconnu, et je sentais que cela me fixait. Et, dans un sursaut, je vis que cela avait une ressemblance avec moi, puis même plusieurs. Nous possédions des choses en commun. Je vis ses traits, et je les sentis alors en moi, me voyant en lui. Je restais quelques minutes dans cette position, et j'eu l'impression qu'un geste de sympathie m'était destiné. Je le rendis, sans réellement comprendre comment, ni pourquoi. Puis à nouveau le mouvement. Je sentai que la Lande disparaissait, que tout ce qu'elle avait été subsistait encore, mais que tout devenait flou, sombre, et étrange. Le sens de cela m'échappait. J'eus le sentiment que tout s'enfouissait au plus profond de moi, doucement, et s'y terrait, restant là, commandant mes pensées, attendant que je revienne à sa rencontre. Puis j'oubliai la Lande, et je fermai les yeux.

...

...

...

J'étais né, et mon subconscient avait trouvé sa source dans ce monde disparu. Disparu ? Pas totalement ; il subsisterait en moi jusqu'à ce que mon enveloppe faillisse ; et alors je pourrai le retrouver, traversant à nouveau la Lande, avalant des Globes, perpétuellement questionné, tiraillé par ces interrogations auxquelles je ne souhaiterai pas de réponse, et tout sera comme cela doit l'être...

... jusqu'au prochain changement.