mardi 9 juin 2009

Alors la nuit quand je dors...


Il y a dans les sourires et les rires une teinte de légèreté. Dans les regards et les questions, une teinte de désintérêt. Dans les rapports, l'amitié, l'affection, une teinte d'ennui.

Vous êtes certes empathiques, mais loin d'ouvrir votre conscience à celle des autres. Qu'importe le pourcentage de communication non-verbale, il vous est trop difficile de changer de peau. La votre vous plaît tant, cette douce chaleur, votre vie, vos idéaux, votre façon de surmonter les problèmes et d'apprécier le bonheur... alors vous estimez que ce qui vous semble logique l'est aussi pour les autres, qu'un problème qui vous est anodin ne peut pas être important aux yeux des autres. Vous ne comprenez pas toujours ce qui se passe hors de vous.

En changeant de peau, vous pourriez écouter. Vos sens vous trompent en permanence, et vous estimez, en plus, que vos bases sont solides. Vos yeux vous mentent, et pourtant vous pensez pouvoir lire en quiconque.
Les mots que prononcent vos semblables ne vous atteignent qu'un instant, puis disparaissent au fond de votre petite tête.
Les sensations, l'état d'esprit sont pour vous classés en catégories simples : "heureux", "triste", "déprimé", "sombre", j'en passe et des meilleures.

Mais personne n'est jamais "plus" que vous. Bien sûr, vous en parlez à d'autres, et plaignez un tel, le dites malheureux. Et au fond, vous vous accablez vous-même pour tenter de le dépasser.

Vous êtes égoïstes parce que dénués d'intuitions et de capacités de compréhension. Vous êtes butés parce qu'incapables d'avouer vos torts. La société valorise vos actions concrètes, et, dès lors, votre chemin de vie vous rend fier et arrogant. Vous êtes reconnus, et le message est clair : "j'ai des capacités qui m'ont permis d'arriver là. Je suis fort."

Et puis vous êtes foutus, de simples enveloppes bonnes à jeter, de ces pions qu'on croise dans les bars, les places publiques ou les supermarchés. Vous devenez bons à rien, bons à vivre, bons pour vous. Vous terminez un peu à la fois de vous bâtir votre carapace, votre petit personnage, que vous prendrez par la suite bien soin d'entretenir.

Mais dès le début, vous avez été guidés, entretenus, orientés vers un caractère. Dès votre naissance, vous étiez prédisposés à devenir ce que vous êtes aujourd'hui. La construction d'un Homme s'opère pendant une durée indéfinie, mais, généralement, après avoir quitté le lycée, la plupart d'entre vous s'estiment "adultes" et endossent leur rôle de "plus de 18 ans" avec fierté. Votre "moi social" grandit trop vite, engloutit ce qu'il restait de vos remises en causes, et parce que vous brillez dans la vie, vous pensez être aptes à juger le monde entier. Vous êtes l'un des pions du beau jeu d'échec qui vous prend sous sa coupe, et, finalement, vous entrez en souriant dans la gueule du loup.

J'apprends au jour le jour à découvrir des gens vrais. Il y en a peu. De ceux qu'on dirait "anti-conformistes", appellation péjorative et marginalisante. Je ne vous parle pas ici de ceux qui se cachent derrière ce titre parce qu'il appartiennent à des mouvements eux-même suiveurs, comme nos amis à crête et chien, ou encore ces adeptes du A triangulaire.
Non, les vrais anti-conformistes ne sont pas à part, ne se cachent pas, ne vous semblent pas étranges.

Parce qu'ils sont assez conscients des normes qui vous étouffent pour passer la tête au-dessus de l'eau sans en sortir totalement. Ils sont dissimulés dans votre société, attendent patiemment le jour où ils pourront vous exhorter à l'action, et, en attendant, se servent de vous à leurs fins.

Et si vous écartez ces gens de votre entourage, c'est parce que votre empathie vous force à les craindre. Vous en avez peur, car, inconsciemment, vous les savez dominants. Et ils le sont.
Vous ne les comprenez pas, justement parce qu'ils ne sont pas soumis aux mêmes règles que vous. Et par dessus le marché, vous estimez avoir une longueur d'avance sur eux, parce que vous vous adaptez mieux à cette société qui les ennuie tant.

Et au final,

Il y a dans vos réflexions une teinte de légèreté,
Dans vos paroles une teinte de désintérêt,

Dans ce que vous êtes, une teinte d'ennui.

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