mardi 10 janvier 2012

Dialogue emprunté

"... !"

"Oui, dis-le. Tu le penses, alors dis-le. ... pourquoi tu ne le dis pas ? Pourquoi tu le gardes pour toi ?
- Je devrais le dire ? J'avoue que j'en ai envie ; je te l'avoue à toi, mais je peux l'avouer aux autres ?
- Si tu le penses, bien sûr que oui. Tu devrais m'écouter. Tu devrais parler. Tu devrais leur dire. C'est drôle / utile / sympa (tu peux rayer les mentions inutiles, si tu trouves qu'il y en a).
-  ...
- Quoi ?
- ... non, je ne trouve ça ni drôle, ni utile, ni sympa, tu sais. Je trouve ça présomptueux, insouciant, distant, fade. Je ne le dirai pas.
- Ah ! Encore tes maux de tête, hein ! Encore tes subtiles questions, tes réflexions intenses ; celles que tu juges toi-même d'un trop bas niveau. En fait, tu passes ton temps à tourner en rond, je me trompe ?
- J'ai vraiment plus envie de le dire, maintenant."

"... ?"

"Et là ? Tu vas savoir ne pas répondre ? Détourner la question ? Moi, elle me vient droit dans le coeur, celle-là : j'ai les mots, laisse-moi parler !
- Te laisser parler, toi ? Ah ! pour que tu débites encore tes conneries nées sur le tas, celles qui viennent tout droit de ton coeur irrémédiablement borné, têtu, absurde ? Non, tu ne diras rien. Laisse-moi faire.
- Toi ? Pour que tu poursuives toujours sur la même lancée, à tenter de reprendre en choeur les mots qui viennent du mien ? Tsss... tu veux parler ? Hé hé, vas-y : parle. Fais-moi rire.
- ... pourquoi tu dis toujours ça ? Pourquoi c'est toujours si rauque, ta voix ? Et pourquoi tu passes ton temps à me juger comme un attardé ?
- Mon ami, il faut que je te le dise : tu es attardé. Regarde simplement où toutes ces discussions nous mènent. A rien. A des cercles autour d'un plot qui lui, attend vainement de te comprendre. Moi je le comprends, tu sais. Je sais exactement ce dont il a besoin, je connais les mots qui le feront bouger, et toi avec. Je connais les moindres ramifications de son coeur ; la couleur précise qu'il aime voir dans le ciel ; l'humour qui lui vrille les amygdales et lui chatouille les abdominaux. Le ventre, le coeur, le sentiment, ça me connait tu sais. Toi, tu ne connais rien.
- C'est faux ! C'est totalement faux, tu le sais, et tu cherches encore à me descendre ! Moi, je reconnais les ondes qu'émet son cerveau ; je peux presque voir sa vie et ses buts, j'entrevois ce qu'il était, ce plot ; et je sais ce dont son existence a besoin. Je sais ce qu'il attend de moi, je peux t'expliquer en long et en large ce qui l'a amené à avoir le coeur mauve, rose, gris ou vert.
- Et tu le sais grâce à moi, parce que c'est toujours le coeur qui parle, non ?"

"Non. Parfois le coeur parle, mais la tête fait le contraire, tu comprends ? C'est comme ça chez nous, c'est comme ça chez eux. Et parfois, les têtes font tourner les coeurs pour protéger les leurs. Parfois, je me dérobe parce que tu es trop imposant, mais crois-tu vraiment que je vais te laisser les rênes de tout ça ? A virevolter entre amour et grossièreté, te laisser te réjouir à chaque flèche perdue ? Tu rêves. Ah... mais oui, rêver c'est ton fort, j'oubliais.
- Tu es un goujat.
- Tu es une peste.
- Tu es un calculateur.
- Toi tu n'es pas en reste.
- Je calcule pour aimer.
- Tu calcules pour voler.
- Tu calcules pour gagner.
- Non, je calcule pour toi."

"..."

"Ah, tiens, c'est drôle ça.
- Euh... oui, c'est vrai. Que faut-il faire ?
- Ben ; rire, non ?
- Rire ? Ca ne serait pas trop ? Qu'en penseront-ils ?
- Ils n'en penseront rien, sinon que tu es beau quand tu ris.
- ... merci.
- Je t'en prie. Ris."

"Tu sais, je me demande souvent ce qui nous a amené à nous retrouver, toi et moi. Etait-ce une grosse blague, là-haut, ou une erreur de notre part ? ... je veux dire... tu as vraiment choisi de venir ici volontairement ?
- Hm ? Je n'en sais rien, comment voudrais-tu que je m'en rappelle ? C'était il y a trop longtemps. Toi-même, tu t'en souviens ?
- Un peu, oui...
- Quoi ? Raconte !
- Eh... il n'y a pas grand chose de précis, en fait. Je me souviens de la chaleur, du rouge, de la pluie et du froid, ensuite. Je me souviens d'un pétrissage lent et douloureux ; d'avoir tourné à deux ou trois carrefours, et d'être arrivé ici. J'avais encore l'odeur d'une femme et les ventricules frêles. Je ne me sentais pas bien. Je me sentais seul... tellement seul. Je n'avais personne pour parler ; personne à aider ; personne à porter ; personne pour me porter.
- Alors je suppose que je suis arrivé ?
- Raaah t'es chiant ! Tu prends toujours les devants !
- Hé hé... en même temps, c'était assez facile à anticiper, sur ce coup-là.
- Hmm... j'avoue que oui. Tu vois, mon défaut c'est d'être trop limpide, trop niais, peut-être, trop direct. Je ne cherche pas à mentir. Ca me blesse que tu dises que je calcule. Je veux juste ton bien et celui des autres.
- Je sais... je sais que tu ne calcules pas. Je sais que tu ne cherches qu'à parler pour faire le bien, pour être heureux. Je sais qu'il n'y a que du beau, en toi. Mais moi... je suis triste de ne pas réussir à expliquer si bien tes mots. Je suis en colère parfois, et ça m'énerve que tu m'empêches de le dire, haut et fort. Je ne veux pas parler, si ce n'est que pour porter tes mots. J'ai mes revendications, moi aussi.
- ... tu dis vrai, je le sens. Oui... mais, si tu avais la colère, tu ferais comme eux : tu calculerais. Et tu calcules déjà bien assez.
- Je calcule, mais à postériori : ce qui a été, ce qui n'a pas été. Et si je le fais, c'est uniquement pour ne pas être en colère.
- C'est donc ça, ce signal qui me parasite à chaque fois ? Celui qui me fait me sentir si lourd, en me remplissant d'informations ?
- Comment ?"





"Alors, je crois qu'il va falloir accepter ça.
- Je le crois aussi.
- ... tu es prêt ?
- Oui.
- A trois. Un... deux...
- JE TE DETESTE !!
- JE TE HAIS !!"

...

" ... c'est bizarre. Tu le sens ?
- Oui... on dirait que... que ça va mieux.
- ... je suis désolé de m'être emporté.
- ... moi aussi, je m'en veux.
- Non, il ne faut pas. Tu avais raison : je pense trop.
- Et toi, tu avais raison : j'aime trop.
- Ha ha ! Je viens de penser à un truc - oui, encore : à nous deux, on pourrait faire deux choses vachement marrantes.
- Lesquelles ?
- Eh bien : "penser à trop aimer", ou "aimer à trop penser".
- Et si l'on faisait les deux en même temps ?
- ... c'est le coeur qui parle, là. Parfois, tu as des raisons que j'ignore ; mais là, je dois dire que ce n'est pas si bête. Si j'ai bien compris, tu voudrais qu'au lieu de tourner autour de ce plot, nous nous lancions une balle par-dessus ?
- Exactement !
- Magnifique idée !
- Oh, tu es génial quand tu décris parfaitement ce que je ressens !
- Et toi, tu es incroyable quand tu ressens parfaitement ce que je décris ! Va pour ça !
- ...
- Qu'est-ce qu'il y a, encore ?
- ... eh bien... j'aime comment tu penses.
- ... je dois dire, que, tu sais, moi je pense que je t'aime."

Aucun commentaire: