mardi 17 mars 2009

Récits et Nouvelles - partie 2

Et tous les jours, à chaque fois qu'il voyait son fils, celui-ci lui posait la même question :

"Dis, papa, est-ce que je suis plus fort que Superman ?"

Rêve de gosse. Celui de s'éclipser de la banalité, d'un univers vide et déprimant, pour voler dans les nuages, embrasser l'infini et dire adieu à la réalité. Mais elle les rattrapait à chaque seconde, lorsqu'ils se retrouvaient à table devant des assiettes trop peu garnies, lorsqu'ils attendaient devant les resto du coeur à la fin du mois ; lorsque Daniel grimaçait devant les factures. Leur quotidien était devenu si banal que le week-end était devenu leur seul échappatoire.

Chaque samedi, ils prenaient le bus et se laissait porter, descendaient lorsque le paysage leur plaisait et marchaient, riaient, mettaient en scène des histoires improbables et niaises, de méchant roi et de gentil prince, de super-héros et de super-méchant. Le simple fait de rêver était pour eux un luxe. L'amour était leur drogue, et ils en abusaient autant qu'ils le pouvaient. Marc grandissait dans une inconscience heureuse, car son père faisait son possible pour qu'il ne regrette pas la télé, les jeux vidéo et les sorties improvisées. Il se contentait de ce qu'il avait et ne demandait jamais plus. Excepté un costume de Superman.

Un matin, alors que Daniel emmenait Marc à l'école, il comprit que son fils grandissait et ouvrait les yeux sur leur précarité.

"Un jour, je serai super fort, et je nous sauverai.
- Pourquoi tu dis ça ?
- Parce que Superman, il peut sauver tout le monde !"

Ce fut la dernière fois que Daniel entendit son fils. Il aurait dû venir le chercher à 16h20, à la sortie de l'école, comme tous les jours, s'il n'avait pas reçu un coup de fil de sa boîte d'interim qui lui proposait un entretien pour un poste de télé-enquêteur. S'il n'avait pas été en retard de 15 minutes, Marc ne se serait probablement pas fait renverser par une voiture.

Mais Daniel ne croyait pas au destin.

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